- Dans les taillis
Dans les taillis
Aquarelle et sur papier
Signature et date en haut à droite : Corneille’ 61
Titre au dos : Dans les taillis
1961
296 x 369 mm

Guillaume Cornelis van Beverloo (dit Corneille)

(Liège 1922 - L'Isle-Adam 2010)
  - Dans les taillis
Dans les taillis
Aquarelle et sur papier
Signature et date en haut à droite : Corneille’ 61
Titre au dos : Dans les taillis
1961
296 x 369 mm

Biographie

« Dans ma longue vie de peintre, j'ai tout vécu avec passion, et si c'était à refaire, je referais la même chose. De ma vie, j'en ai fait une belle journée colorée. »
Corneille, pseudonyme de Guillaume Cornelis van Beverloo, est un peintre, graveur, sculpteur et céramiste néerlandais né le 4 juillet 1922 à Liège. En 1943, après avoir suivi les cours à l’Académie des Beaux-Arts d’Amsterdam, il abandonne le cursus classique pour expérimenter de nouvelles techniques et s’exprimer plus librement. En ce temps-là, la guerre éclate et projette son ombre sur le monde. Malgré l’enfer de la guerre, Corneille continue à peindre. À la libération, il décide d’oublier cette période et embrasse la liberté retrouvée.
En 1947, il est invité à exposer ses peintures à Budapest. Il y découvre les œuvres de Paul Klee et rencontre Jacques Doucet. En 1948, il co-fonde l’Experimentele Groep in Holland avec Karel Appel, Eugène Brands, Theo Wolvecamp, Anton Rooskens, Constant Nieuwenhuis et bien d’autres artistes néerlandais. Dès l'ouverture des frontières, nombreux sont les artistes qui éprouvent le besoin de se libérer de l'isolement imposé. Composé aussi bien de peintres que de poètes, le groupe préconise la spontanéité dans l'art. Ainsi se forment les prémices du mouvement CoBrA. Le 8 novembre de la même année, l’acte de fondation du groupe CoBrA intitulé La cause était entendue réunit Asger Jorn, chef de file du surréalisme abstrait danois et Christian Dotremont, poète et peintre belge, ainsi que Joseph Noiret, Karel Appel, Constant Nieuwenhuys et Corneille. Le groupe se détache du passé, de l’abstraction géométrique, du rationalisme et du surréalisme. Il se dresse contre toute forme de discours théorique, contre tout esthétisme et formalisme et contre les mouvements en « isme », clamant la nécessité de l’esprit expérimental et refusant tout cloisonnement. Le groupe CoBrA n’a eu qu’une existence brève de trois années. Constitué le 8 novembre 1948 dans le café Notre-Dame à Paris, il réunit des peintres, des sculpteurs et des poètes représentant trois pays : les Pays-Bas, le Danemark et la Belgique. L’acte de naissance approuve la formation du groupe sous le nom de CoBrA, CO pour Copenhague, BR pour Bruxelles et A pour Amsterdam. Ce mouvement artistique expérimental devient l’un des mouvements les plus important d’après-guerre. CoBrA est plus qu’un collectif d’artistes, c’est un état d’esprit et un mode de vie. Michel Ragon écrit à ce sujet : « CoBrA est moins une tendance qu’une occasion de rencontres heureuses. ». Les tableaux du groupe donnent vie à des personnages parfois proches de l’art primitif, inspirés de l’art populaire principalement nordique. Ce bestiaire est également empreint de Contes et de Fables traditionnels danois. Les artistes inventent des créatures et des bestioles inspirées des dessins d’enfants. En 1949, Corneille entreprend son premier voyage en Afrique du Nord où il découvre le monde arabe et berbère. L’important, pour lui et ses compatriotes, est la liberté d’expression dans l’art à travers les couleurs, les matières et les mots, sans contraintes ni règles. Ils créent par ailleurs des œuvres uniques, impriment de nombreuses publications, organisent des ateliers, des réunions d’information-débat et des expositions regroupant des artistes internationaux. Le dénuement, la maladie et les querelles mettent fin au groupe le 6 novembre 1951 avec leur dernière Exposition internationale d’Art expérimental qui a lieu aux Musées des Beaux-Arts de Liège. Comme l’exprime si bien Christian Dotremont, CoBrA a été « le marché commun de la misère et de l’exubérance ». Cette dernière exposition n’a déjà plus grand chose à voir avec l’esprit du groupe, invitant des artistes aux préoccupations et aux horizons divers comme Alberto Giacometti. Néanmoins, elle permet une fois encore de bousculer la vision de l’art institutionnel.
Après la dissolution du groupe, chaque artiste suit un chemin personnel, en gardant des contacts les uns avec les autres. Corneille travaille beaucoup avec Hugo Claus, un de ses plus proches amis du groupe CoBrA, apportant aux textes de celui-ci des dessins, des gravures ou des lithographies, et vice-versa. À partir des années 50, il commence à exposer dans les grandes galeries parisiennes comme la Galerie Maeght (1950), la galerie de Colette Allendy (1954), la Galerie Ariel (1961), la galerie Mathias Fels (1964) et à New-York dans la Lefebre Gallery (1962). Il expose aussi dans des musées comme le Musée de Curaçao (1954), le Palais des Beaux-Arts de Bruxelles (1956) ou encore au Stedelijk Museum d’Amsterdam (1956 et 1960). Réputé pour ses peintures et ses dessins, Corneille expérimente divers médiums tout au long de son parcours. Ce qui compte pour lui, c’est « la créativité avant tout ! ». En 1953, il s’initie à la gravure à l'eau-forte dans l’Atelier 17 de Stanley William Hayter à Paris. Corneille crée des lithographies, des aqua-gravures, des gravures, mais aussi des sculptures (en céramique, en bronze, en résine, en verre), des bijoux d’artiste, de la vaisselle en porcelaine de Limoge, des tapisseries, etc. En 1995, il s’installe avec sa famille dans la région du Val d’Oise, à L’Isle-Adam. La lumière de cette région a de tout temps attiré d’illustres peintres. De son atelier au milieu des champs qu’il ne quitterait pour rien au monde, Corneille se laisse imprégner par la lumière et le chant des oiseaux. Il est d’ailleurs considéré comme le peintre lumineux de la couleur : « la lumière pour un peintre, dit-il, c’est le bonheur ! ».
Après avoir évolué vers l’abstraction (paysagisme abstrait) après la dislocation du groupe CoBrA, Corneille revient à la figuration au début des années 1960. Corneille est un oiseau libre. Il ne reste jamais très longtemps à la même place. Tout au long de sa vie, l’oiseau voyageur fait le tour du monde : Afrique noire, Amérique latine, Mexique, Brésil, Asie du sud-est, Indonésie, Bali, Chine, Japon, Israël, États-Unis, Italie, Hongrie, Danemark, etc. Chaque voyage est l’occasion de faire de nouvelles rencontres et de trouver de nouvelles inspirations. Impressionné par la luxuriance de la nature de certains pays, il retrouve le vocabulaire expressionniste et passionné de la période CoBrA. Il écrit également des poèmes et des critiques d’art. En 1976, il publie son Journal de la Tour (1976) : « Ce que je dessine, je ne l’écris pas, mais ce que j’écris, j’aimerais le dessiner. » Les textes poétiques de Corneille sont illustrés de 31 travaux originaux. La photographie tient également une place importante dans sa vie. Plusieurs albums photographiques consacrés à ses voyages et à sa collection d’art africain sont publiés en 1977. De 1982 à 1992, il participe à de nombreuses expositions et développe son œuvre graphique entreprise dès 1948. Corneille est l’un des premiers artistes à créer des œuvres pour la promotion d’une banque (ABN AMRO, Pays-Bas) ou d’un organisme (GREENPEACE, Pays-Bas). Dans sa pratique artistique comme dans sa vie, Corneille garde un esprit d’enfant friand de nouvelles expérimentations. Il projette ses dessins sur des stylos, des voitures, un ballon dirigeable, des cravates et même un tram d’Amsterdam. Comme le dit sa femme Natacha van Beverloo, s’inspirant de la célèbre phrase d’Arthur Rimbaud, « Corneille est un éternel voyageur, un homme aux semelles de vent avec toujours un pied dans le bac à sable, un jeune grand peintre. » Bien que l’on puisse voir une continuité dans son travail, l’œuvre de Corneille se compose de plusieurs périodes bien distinctes : la période de jeunesse jusqu’à 1947 où le portrait a une place importante ; la période CoBrA de 1948 à 1951, très imaginative avec des personnages étranges et un bestiaire coloré ; la période post-CoBrA souvent décrite comme sa période d’Abstraction lyrique de 1951 à 1955 ; et la période minéralogique de 1955 à 1965, qu’il appelle lui-même « géologique », où les compositions et les formes rappellent le désert du Hoggar en Algérie. Michel Ragon parle de paysagisme abstrait pour décrire la période figurative à partir de 1970 où femmes, oiseaux et serpents s’entremêlent. On retrouve dans l’œuvre de Corneille plusieurs thèmes principaux : la Femme représente la terre, l’Oiseau incarne l’élément masculin et l’artiste lui-même, le Soleil et le Serpent symbolisent le sexe féminin et masculin, le Chat, les Astres, la Musique et la Nature. Ses thèmes de prédilection s’expriment seuls ou en dialogue les uns avec les autres. En 2007-2008, il fait une synthèse de ces différentes périodes, où compositions abstraites, « couleurs Corneille » et thèmes principaux se retrouvent rassemblés dans des œuvres pleines de poésie.
Pendant plus de 70 ans, Corneille conjugue avec génie un vocabulaire pictural personnel, coloré et envoûtant. Son œuvre est un appel à la rêverie, à l’imagination et à la liberté. Le dimanche 5 septembre 2010, l'oiseau-Corneille s’envole au ciel laissant derrière lui une œuvre magistrale à transmettre aux générations futures. Il est inhumé selon son vœu à côté de Vincent van Gogh dans le cimetière d'Auvers-sur-Oise.
 
Références bibliographiques
Corneille Guillaume, s.d., www.corneilleguillaume.com, 23 août 2022.